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Le puzzle des inégalités et ses conséquences biologiques

mercredi 11 mai 2011







En 2004, le congrès américain votait une série de réduction d’impôts pour les plus riches. Sept ans plus tard, Barack Obama échouait à rendre caduques ces dispositions. En 2007, Nicolas Sarkozy faisait du « bouclier fiscal », une mesure permettant aux plus riches de ne pas payer en impôts directs une somme supérieure à 50% de leurs revenus, un de ses arguments de campagne. Malgré les critiques quasi-unanimes de la classe politique, y compris de la majorité, la mesure ne sera abrogée que quatre ans après laissant place à une large exonération de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Depuis la crise financière, la sensibilité aux inégalités a changé toutefois: on ne compte pas le nombre de films sur la chute du capitalisme, de Inside Job à Ma part du gâteau en passant par moi Michel G, milliardaire.


Pourquoi la sensibilité aux inégalités a-t-elle changé ? Une des raisons souvent évoquées est que les inégalités ont augmenté. Un indicateur commun est le coefficient de Gini qui va de 0 (tout le monde a le même revenu) à 1 (une seule personne a l’ensemble du revenu). Tous les pays du monde ont grosso modo entre 0,25 et 0,6 pour la distribution du revenu. Pour les ménages américains, l’indice de Gini est passé de 0,34 au milieu des années 1980 à 0,38 dans le début des années 2000. En Chine, l’indice est passé de 0,3 à 0,4. D’après Robert Gordon (Université de Northwestern), les inégalités n’ont pas augmenté depuis 1993 pour 99% de la population. Comme l’ont souligné Piketty et Saez (2007) et Saez (2008), les inégalités ont par contre augmenté entre les super-riches et les autres. Les 0,1% les plus riches détiennent 8% du PIB du pays. L’Economic Policy Institute, un think-tank américain, les 0,1% les plus riches ont des revenus 80 fois supérieurs à ceux des 90% les moins riches. Il y a vingt ans, le ratio des deux revenus était de 20.

L’augmentation des inégalités n'est pas seulement un problème économique (au sens d'accès aux bien-être) mais c'est également un problème sociologique - nous accordons dans les pays industrialisés des rendements disproportionnés à la richesse - et politique - les inégalités accroissent l’exclusion en rendant littéralement misérables les plus démunis.



Dans The Spirit Level, un best-seller aux Etats-Unis, Richard Wilkinson et Kate Pickett, soutiennent la théorie selon laquelle les inégalités auraient des effets médicaux avérés dont l’impact touche l’ensemble de la société. Le stress lié aux inégalités entraîne la sécrétion d’une hormone, le cortisol. Les personnes qui vivent dans des sociétés inégales secrètent moins d’ocytocine, une hormone peptidique qui favorise les interactions amoureuses mais également la défense du groupe et qui est donc assimilée à la confiance en soi. Le lien médical n’est toutefois pas avéré car il n’existe pas d’études généralisées à l’ensemble de la population. C'est une question que les chercheurs devront élucider au plus vite.

Toutefois, au niveau macroéconomique, les inégalités et leur impact sur la confiance peuvent peser sur la croissance : les pays scandinaves ont un haut niveau de confiance et de faibles inégalités de revenus. Les inégalités sont également une question de structure : une société figée, basée sur les castes comme en Inde, ou sur les Hukou chinois - un système de permis de résidence qui limite les migrations vers les villes - risque d'imploser.

Les inégalités ont un effet pervers sur la politique économique. Depuis plusieurs années, les politiques ont été concentrées sur les plus riches quand l’enjeu d’avenir pour une économie est d’ouvrir les possibles des classes moyennes en cassant les barrières à l’éducation. C’est également lutter contre le côté répétitif et biaisé des inégalités comme j'ai pu l'aborder sur d'autres sujets: le progrès technologique défavorise les non-qualifiés et le marché du mariage est strictement cloisonné selon le niveau d’éducation.

Crédit photo Stephen Shames.

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